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Construire la communauté coopérative à travers le droit. Un entretien avec Jean-François Draperi

Chantal Chomel : Le choix fait par les rédacteurs de cette « loi coopérative utopique » va à rebours de la situation actuelle du droit coopératif. Comme vous le savez, celui-ci est issu de  circonstances historiques diverses, ce qui a donné naissance à autant de statuts que de catégories de coopératives. Pour vous, le choix d’un statut unique, avec des prises en compte de particularités limitées à ce qui est strictement nécessaire, est-il une avancée, un avantage, un facteur de meilleure reconnaissance des coopératives, ou va-t-il à l’encontre de l’identité des coopératives, au risque d’être contre-productif ? Quel regard portez-vous sur ce choix ?


Jean-François Draperi : Il me semble qu’aller vers un statut unique et sui generis est un pas en avant sur le plan de la clarté du statut coopératif et sur le plan d’une construction identitaire commune à toutes les coopératives. En France, l’identité coopérative (au sens « intercoopératif ») entre les mouvements est faible, ce qui me semble constituer un préjudice important à l’expression d’une identité coopérative. C’est un problème majeur et, sans en être certain, j’ai le sentiment qu’une telle loi pourrait contribuer à le réduire.

 

Numéro de revue: 
352
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Chantal Chomel

Vers une loi coopérative rénovée ? Une proposition juridique entre prospective et utopie

Pour tenter de pallier les inconvénients liés à la disparité et au nombre important de dispositions juridiques régissant le secteur coopératif français, un collectif de juristes a rédigé un corps de règles regroupées dans un texte unique, visant ainsi à renforcer l’identité coopérative, à faciliter la création et le fonctionnement d’une coopérative, à sécuriser la filialisation et les opérations de restructuration, tout en clarifiant le régime des excédents, des réserves et de la ristourne. Ce travail sur le droit coopératif a été mené de façon à préserver les coopératives existantes et leurs différents statuts. Cet article présente cette démarche de codification du droit coopératif français.

 

Numéro de revue: 
352
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Patrick Prud’homme

La pensée coopérative bulgare au XX e siècle, au confluent des théories d’Europe occidentale et orientale

Cet article porte sur l’histoire de la pensée coopérative en Bulgarie depuis la libération à l’égard du joug ottoman (1878) jusqu’à la chute du régime communiste en 1989 et au début de la transition vers une économie de marché. Cette pensée coopérative s’est développée au XX e siècle sous l’influence de divers courants d’idées et a été marquée par le transfert de théories, de pratiques et d’institutions provenant d’Europe de l’Ouest mais aussi d’Europe de l’Est. L’auteure présente de façon périodisée l’évolution de la pensée coopérative bulgare en soulignant les moments où les influences extérieures ont prédominé et ceux où ont émergé des idées et des institutions coopératives originales.

 

Numéro de revue: 
352
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Tsvetelina Marinova

Des coopérateurs en loge (1890-1920) : l’histoire oubliée du Progrès et de l’Éducation coopérative

Au tournant du XX ème siècle, deux loges aujourd’hui oubliées du Grand Orient de France ont contribué à promouvoir l’idée coopérative. En premier lieu, le Progrès, une loge historique dont le recrutement s’est prolétarisé, accueille à partir des années 1880 un groupe de dirigeants coopérateurs parisiens liés à la Chambre consultative des associations ouvrières de production. Suite à une scission, la majorité de ces militants s’émancipent en fondant un nouvel atelier (loge), l’Education coopérative (1904-1920), qui constitue à ce jour le seul exemple de loge en France consacré au projet coopératif. Cet article étudie la vocation singulière de ces loges ainsi que leur déclin avant même la guerre de 1914-1918 qui fragilise l’ensemble de la franc-maçonnerie.

 

Numéro de revue: 
352
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Éric Lebouteiller

Les organisations paysannes, un nouvel acteur des politiques agricoles en Afrique de l’Ouest ?

En Afrique de l’Ouest, le contexte est porteur pour la reconnaissance de l’agriculture familiale durable. Au lendemain des indépendances, les coopératives de producteurs sont d’abord apparues comme des appendices des autorités gouvernementales. Les sécheresses des années 1970 ont ensuite amené les gouvernements à une certaine ouverture vis-à-vis des mouvements paysans, dans le cadre d’actions de développement. La Fédération des ONG du Sénégal (FONGS), créée en 1976, a ainsi joué un rôle précurseur pour le mouvement paysan en Afrique de l’ouest. La mise en œuvre des plans d’ajustement structurel à partir des années 1980 a renforcé l’émergence d’organisations de producteurs et de plates-formes nationales, avec des leaders paysans développant une vision régionale de la problématique de l’agriculture.
Ces processus ont abouti à la création du Réseau des organisations paysannes et des producteurs agricoles de l’Afrique de l’Ouest (Roppa) (Cissokho, 2009) à Cotonou (Bénin) en 2000. Le Roppa, après dix années de travail, a réussi à inscrire l’agriculture familiale dans les politiques régionales 1 (Magha, 2010).
Plusieurs travaux récents mettent en évidence l’importance de l’agriculture familiale dans la perspective de devoir nourrir une population de plus de 9 milliards d’êtres humains à l’horizon 2050. Parmi ceux-ci, une étude canadienne de l’University of British Columbia, intitulée How much of the world’s food do smallholders produce ? (Ricciardi et al., 2018), confirme que les agricultures familiales sur petites surfaces produisent une part de la nourriture mondiale proportionnellement supérieure à la portion de terre qui leur est attribuée. Il s’agit donc bien d’agricultures productives (Coopman, 2018) et non seulement de subsistance, comme elles sont parfois décrites.

 

Numéro de revue: 
352
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Marc Mees, Dominique Morel et Pape Assane Diop

Esquisse d’une histoire démocratique de l’économie sociale et solidaire en France

La gouvernance démocratique est l’un des trois piliers constitutifs de l’économie sociale et solidaire, avec la limitation de la lucrativité et l’utilité sociale. Elle renvoie surtout à des règles, à des instruments ou à des pratiques à un niveau micro-socioéconomique, mais elle doit aussi être analysée dans une perspective néo-institutionnaliste, afin d’élargir la focale aux réarrangements institutionnels entre l’État, le marché et la société civile, ayant un impact sur elle. Cet article propose une relecture historique des transformations institutionnelles de l’ESS sur la longue durée, en explorant deux tensions : l’une entre la loi et le contrat, l’autre entre l’économie et la société. Il en dégage les « moments critiques » et identifie cinq cycles à partir des métamorphoses de la démocratie.

 

Numéro de revue: 
351
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Timothée Duverger

Les nouveaux enjeux de la gouvernance des associations

La gouvernance est un terme polysémique qui naît dans l’univers des entreprises marchandes avant d’être mobilisé dans le contexte des organisations publiques. Après avoir rappelé brièvement l’histoire du concept, ainsi que la manière dont celui-ci est utilisé par les associations, l’auteur dégage trois perspectives ouvertes par les questions de gouvernance en lien avec l’évolution du modèle associatif. La première perspective repose sur la capacité des associations à s’engager sur des modèles multi-acteurs. La deuxième sur leur vocation à développer des démarches participatives à vocation inclusive pour accueillir les personnes les plus exclues de l’action publique. La troisième perspective témoigne d’un large mouvement de reconnaissance des communs. Au final, la gouvernance des associations apparait comme un espace doté d’une logique propre inaugurant un nouveau champ de recherche.

 

Numéro de revue: 
351
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Philippe Eynaud

D’une coopérative de consommateurs à la Scop Sadel : concevoir une gouvernance partagée

La Sadel (Société angevine d’édition et de librairie) est une coopérative de consommateurs spécialisée dans la librairie et la papeterie scolaires, créée autour de deux valeurs : défendre la laïcité et favoriser l’égalité des chances à l’école publique. En 2017, elle fait partie des quatre coopératives ayant survécu à la concurrence dans son secteur lorsqu’elle change de statut et d’échelle en devenant une Scop. Cette transformation a permis la mise en place d’une gouvernance partagée. Après un rappel théorique des liens entre démocratie et gouvernance, cet article met en lumière l’originalité de la transformation de la coopérative de consommation Sadel en une Scop-SAS et montre comment une entreprise de l’ESS peut réinventer sa gouvernance démocratique.

 

Numéro de revue: 
351
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Valérie Billaudeau et Patrice Moysan

L’usage du numérique, facilitateur de la gouvernance ? Le cas des coopératives agricoles

Avec l’accroissement de la taille des coopératives agricoles, la proximité avec les associés coopérateurs et la capacité de ces derniers à peser sur les décisions sont fréquemment remises en cause. Grâce à un travail original de recherche-action impliquant de jeunes agriculteurs et des étudiants, les auteurs montrent que la nouvelle génération considère les outils numériques comme des solutions pouvant fluidifier les échanges et favoriser l’implication des coopérateurs dans les décisions. Différents outils sont envisagés et des indications sont données quant à leur pertinence du point de vue du coopérateur. En interrogeant la relation coopérateur-coopérative, cette étude met ainsi en lumière le souhait des jeunes agriculteurs de trouver les moyens de favoriser les échanges entre adhérents aux préoccupations et pratiques communes.

 

Numéro de revue: 
351
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Sabine Duvaleix-Tréguer, Françoise Ledos et Guillaume Lepetit

Géographie économique de l’économie sociale : une cartographique contemporaine des modèles du XIX e siècle

L’ancrage territorial est constitutif de la définition même de l’économie sociale et solidaire (ESS). Des modèles apparaissent ou se renforcent au XIX e siècle, concomitamment à la révolution industrielle. En France, quatre modèles se sont construits, corrélés à quatre visions du territoire : l’économie de la réparation, fondée sur la notion d’espace vécu ; l’économie de la résistance, en référence à l’idée de développement local ; l’économie de la nécessité, en lien avec le concept de territoire-ressource ; et enfin l’économie identitaire, reposant sur la spécialisation régionale. La permanence de ces modèles est interrogée par le biais d’une étude cartographique, qui révèle que seul le premier (l’économie de la réparation) n’a pas perduré dans le temps.

Numéro de revue: 
351
Année de publication: 
2019
Auteur(s): 
Cécile Le Corroller