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Les directeurs·trices de centres sociaux face à la bureaucratisation. Les conditions de travail dans le monde associatif dépendantes de l’action des pouvoirs publics ?

Les pouvoirs publics ont toujours imprimé leur marque sur le monde associatif employeur, qu’ils financent et réglementent largement (Hély, 2009 ; Cottin-Marx, 2019). Grâce aux travaux de Viviane Tchernonog et de Lionel Prouteau (2019), nous savons que les rapports entre la puissance publique et les associations se sont considérablement transformés ces dernières années, en particulier depuis la crise économique de 2008, et qu’ils ont été marqués par la stagnation des financements publics et le développement de la logique contractuelle (Lipsky et Smith, 1989-1990). Ces évolutions n’ont pas été neutres pour les associations. Pour ces auteurs, elles ont entraîné le déplacement des projets associatifs vers des publics plus solvables, réduit la capacité des organisations loi 1901 à expérimenter et à innover, et conduit à la concentration des financements publics dans les grandes associations, « qui ont la taille critique et les ressources humaines suffisantes pour accéder à ces formes de financements » (Tchernonog et Prouteau, 2017). Une situation qui exclut de fait les associations employeuses de taille plus limitée des circuits du financement public et a entraîné la disparition d’un grand nombre d’entre elles : entre 2011 et 2017, le nombre d’associations employeuses est passé de 182 000 à 159 000 (-13 %).

Si, grâce aux auteurs du Paysage associatif français, les conséquences de ces évolutions sur les associations sont documentées, les effets sur les salariés et l’organisation du travail sont moins étudiés par les chercheurs. Quels ont été les résultats de cette dynamique, alimentée par la crise économique de 2008, sur le travail dans les associations ? Au moment de la rédaction de cet article, en mai 2020, cette question prend une acuité nouvelle. Car tout semble indiquer qu’une nouvelle crise économique (et des finances publiques) va se surajouter à la crise sanitaire que nous traversons en raison de la pandémie de Covid-19. Il est aujourd’hui difficile d’en prédire les contrecoups. Cependant, en interrogeant la crise passée et ses conséquences nous espérons en tirer des enseignements pour celle qui commence.

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Numéro de revue: 
357
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Simon Cottin-Marx, Emmanuelle Paradis

L’après Covid-19 : vers un regain d’intérêt pour le modèle de la mutuelle d’assurance ?

Au contraire de secteurs tels que la grande distribution, le médico-social ou l’éducation, le secteur de l’assurance sort de la crise du Covid-19 avec une image fortement ternie par une double critique dont il est encore difficile d’apprécier les effets à terme. Les assureurs, en effet, sont attaqués sur deux fronts. D’abord celui de la légalité, puisqu’ils sont accusés de refuser d’honorer certains de leurs engagements contractuels. Ensuite celui de la moralité, car ils apparaissent réticents, malgré leur excellente santé financière, à participer à l’effort national, voire semblent vouloir mettre à profit la crise - qui entraîne une diminution importante du nombre de certains sinistres, automobiles en particulier - pour augmenter leurs bénéfices.

La critique est d’autant plus vive que le secteur de l’assurance a engrangé des bénéfices importants durant les décennies passées. L’Union des métiers de l’industrie de l’hôtellerie (UMIH) a rappelé que, dans le secteur de la restauration et de l’hôtellerie, les assureurs avaient reçu au cours des vingt dernières années plus de 90 milliards d’euros de primes et versé environ 40 milliards d’euros d’indemnisation. Les comptes de la seule entreprise Axa révèlent qu’à l’issue de l’exercice 2019 celle-ci dispose d’une trésorerie de 21 milliards d’euros, qu’elle a distribué plus de 2 milliards d’euros de dividendes à ses actionnaires et que ses actifs sous gestion représentent trois fois le plan de soutien à l’économie annoncé par le gouvernement . L’UFC-Que choisir estime à plus de 2 milliards d’euros le montant que les assureurs devraient reverser aux assurés en raison de la chute des sinistres automobiles durant le confinement, ce qui représente 50 euros en moyenne par contrat auto. Les chiffres de l’assurance montrent que le secteur dispose de réserves largement suffisantes pour faire face à un plan de sauvetage ambitieux de certaines catégories de leurs assurés particulièrement touchés par la crise du Covid-19.

L’épidémie de Covid-19 aura révélé la réticence des assureurs à puiser dans leurs réserves accumulées pour redistribuer, en quelque sorte, une partie des bénéfices réalisés en période de croissance, et leur incapacité à répondre de manière satisfaisante aux attentes de certains groupes d’assurés  particulièrement exposés. Le secteur de l’assurance a notamment tenté de faire front commun pour s’opposer à toute indemnisation des pertes subies par les entreprises dont l’activité a été mise à l’arrêt en raison du confinement, arguant du fait qu’il s’agit là d’un risque « inassurable sur le plan tant économique que juridique », et par conséquent non couvert par les contrats souscrits.

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Numéro de revue: 
357
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Éric Bidet

Caractériser la démarche des Scop en matière de RSE : quel couplage entre les discours, pratiques et outils ?

Cet article s’inscrit dans une perspective d’enrichissement des connaissances de la responsabilité sociale des entreprises (RSE) et des comportements organisationnels qui lui sont associés, en s’intéressant aux entreprises de l’ESS que sont les sociétés coopératives et participatives (Scop) – dont les engagements sociétaux sont statutairement importants. En s’appuyant sur l’étude de trois Scop, cet article identifie les outils mobilisés par ces entreprises ainsi que le degré d’intégration de la RSE dans la conduite de leurs activités, au regard des discours tenus sur cette démarche. Sur cette base, l’article montre une certaine homogénéité, tant discursive que des outils mobilisés, mais des pratiques différenciées. En illustrant les spécificités des Scop en matière de RSE, l’étude met également à jour des comportements vertueux de nature à inspirer de nombreuses organisations.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Christophe Maurel, François Pantin

De la contestation des accords du Gatt à la création des Amap : genèse d’un mouvement devenu emblématique de l’ESS

Cet article apporte un éclairage nouveau sur la genèse des Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) en les réintégrant dans une histoire militante qui prend sa source au début des années 1990 avec l’Alliance Paysans Écologistes Consommateurs (PEC). Le traitement des archives de cette organisation montre combien la transformation de la cause du rapprochement des agriculteurs et des consommateurs est sensible à l’évolution du contexte politique. Ainsi, l’institutionnalisation de l’économie sociale et solidaire qui intervient au début des années 2000 tient une place déterminante dans l’émergence et la diffusion des Amap. L’article invite à analyser les initiatives relevant de l’économie sociale et solidaire à partir des outils de la sociologie des mouvements sociaux, afin de rendre compte de la dimension contestataire de l’ESS au regard des évolutions du militantisme.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Jean-Baptiste Paranthoën

Quels pouvoirs informels au sein des circuits courts et locaux agroalimentaires ? Le cas du Limousin

Cette recherche porte sur des collectifs de production agricole en circuits courts et locaux agroalimentaires (CCLA), établis dans le Limousin, souhaitant avoir un fonctionnement démocratique, inspiré directement ou indirectement de l’économie sociale. Leurs statuts et les dispositifs techniques participatifs permettent de limiter la concentration des pouvoirs et facilitent leur répartition selon un principe démocratique. Toutefois, ce fonctionnement démocratique est impacté par les pouvoirs informels liés aux rapports sociaux des membres. Il s’agit ici de repérer et catégoriser ces sources informelles de pouvoir, d’en analyser les interactions avec les sources formelles, afin de mettre à jour la gouvernance effective.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Marius Chevallier, Julien Dellier

L’économie sociale au Portugal de la révolution des Œillets de 1974 jusqu’aux années 1990 : institutionnalisation, débats et compromis

Cet article retrace le processus historique de l’institutionnalisation de l’économie sociale et des politiques de solidarité au Portugal, de la révolution d’avril 1974, dite révolution des Œillets, aux années 1990. Prenant comme référence le concept d’économie sociale fixé par le cadre juridique portugais, l’auteur étudie les relations institutionnelles et idéologiques établies entre les politiques sociales publiques instituées par le nouveau gouvernement démocratique et l’action des organisations identifiées comme appartenant à l’économie sociale et solidaire. L’analyse repose sur une perspective institutionnaliste qui n’élude pas toutefois la référence aux jeux de pouvoirs et à la dynamique des intérêts. Le cas portugais illustre le bénéfice que peuvent apporter l’institutionnalisation et l’État-providence aux pratiques volontaires de solidarité et de coopération.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Álvaro Garrido

Aider les coopératives à aider l’État. Politiques publiques et coopératives rurales aux États- Unis (Wisconsin, années 1910-1930)

L’implication des coopératives dans les politiques publiques s’accompagne-t-elle nécessairement d’un retrait de la puissance publique, comme on semble l’observer à l’ère du néolibéralisme ? L’auteure répond à cette question via l’étude des coopératives rurales du Wisconsin entre 1910 et 1940. Elle analyse l’arsenal des mesures mises en place par l’État en direction des coopératives en distinguant différentes formes d’intervention (enquête, éducation, protection et organisation). Elle montre ainsi que l’État, peut être amené à mobiliser les coopératives dans un contexte d’interventionnisme fort, comme vecteurs de politiques publiques et non comme une alternative à son action. Enfin, cet article témoigne du fait que l’intervention publique n’est pas neutre : elle conduit à privilégier un certain type de coopératives, à favoriser la centralisation et la rationalisation, mais aussi parfois à défendre des pratiques démocratiques.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Alexia Blin

Commercialiser des produits agricoles sans étude de marché : facteurs de réussite de trois coopératives en Israël dans les années 1980

Alors que l’étude de marché n’est pas toujours efficace pour assurer la commercialisation des produits agricoles, cet article présente une approche originale développée en Israël par des coopératives agricoles ayant réussi à créer des marchés de consommateurs pour écouler les productions de leurs membres.
Le mouvement coopératif a démarré en Israël vers la fin du XIX e siècle avec la fondation par le baron Rothschild des vineries coopératives de Carmel Mizrachi. Bien que de renommée médiocre, ce vignoble a dominé le marché israélien du vin de table jusqu’à la fin des années 1980. Puis le mouvement coopératif rural dans ce pays a pris un second élan avec la création des kibboutzim et des moshavim au début du XX e siècle (Galor et Sofer, 2011). Le kibboutz, village collectif, et le moshav, village coopératif, constituent les deux types caractéristiques de communautés rurales en Israël. Ces coopératives de premier degré, dont les membres sont des individus, ont fondé des coopératives du deuxième degré, comme les entreprises régionales et les vineries. Ces structures de type multifonctionnel étaient dispersées sur tout le territoire d’Israël (Galor, 2015). Au cours de la deuxième moitié du XX e siècle, la production viticole est devenue excédentaire, ce qui a entraîné des difficultés de commercialisation.
Dans cet article, nous présentons trois études de cas où les agriculteurs, membres d’une coopérative, ont élaboré un plan de commercialisation à partir de la marque qu’ils ont créée pour leurs produits. Si le facteur coopératif a été déterminant dans la réussite du proces- sus de commercialisation, il convient également de mentionner l’importance du rôle joué par les dirigeants de ces structures.

 

Numéro de revue: 
356
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Zvi Galor

La monnaie locale eusko, une démarche stratégique dédiée à la création de valeur publique territoriale

Fin 2018, l’eusko, implanté au Pays basque, est devenu la première monnaie locale européenne. Portée par l’association Euskal Moneta (EM), cette initiative vise à relocaliser l’économie, défendre et promouvoir la langue basque, renforcer les pratiques écologiques et solidaires et raviver le lien social. Au regard de ces ambitions, la capacité de l’eusko à se positionner comme un outil de renouvellement de l’action citoyenne et de l’action publique est questionnée. L’auteure montre comment EM a entraîné des modifications dans les pratiques de gestion de l’action publique territoriale en étant le vecteur d’un questionnement – tant sur les modalités de construction démocratique d’une politique économique localisée que sur les dispositifs au service de cette politique. Ce travail contribue à la construction de connaissances sur le renouvellement de l’action publique et citoyenne à l’initiative d’acteurs privés.

 

Numéro de revue: 
355
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Fabienne Pinos

Les clubs d’investisseurs Cigales et leur gestion de l’épargne solidaire : un commun de la finance territoriale ?

En quoi l’activité d’un Club d’investisseurs pour une gestion alternative et locale de l’épargne solidaire (Cigales) relève-t-elle du champ théorique et pratique des communs ? À partir de l’analyse
d’Elinor Ostrom et de ses prolongements, cet article caractérise la ressource immatérielle qui réunit les investisseurs des clubs Cigales, analyse leurs droits et obligations et montre qu’une Cigales peut s’auto-organiser sous réserve de dispositions légales et associatives. La deuxième partie illustre, au travers de l’enquête menée au sein de la Métropole de Lyon, comment les  cigaliers se dotent de règles implicites et explicites pour mener à bien leurs actions de financement. Le « faire commun » semble trouver un prolongement dans le co-accompagnement de projets par plusieurs Clubs, ou encore dans la mutualisation des droits exercés par leurs membres.

Numéro de revue: 
355
Année de publication: 
2020
Auteur(s): 
Jérôme Trotignon