La mise en place de normes et de procédures européennes au sein du secteur social et l’arrivée de nouveaux acteurs associatifs en France – fonctionnant sur un modèle de start-up pour intervenir dans le domaine du social – soulèvent plusieurs questions relatives à l’avenir de plus de deux mille centres sociaux français. Ces derniers sont des structures de proximité, reconnues d’utilité publique, proposant des activités sociales, éducatives, culturelles, familiales, répondant aux besoins des habitants, dans une démarche d’éducation populaire et d’animation du territoire.
Mais, depuis l’adoption en 1986 de l’Acte unique européen et la libéralisation de la partie économique des services sociaux des pays membres, la conception de l’intervention sociale est transformée via des notions de productivité, de rentabilité et de modernisation. Nous appellerons ce processus l’« européanisation », qui remet en cause l’organisation traditionnelle des services publics tout en transformant progressivement une mission d’intérêt général en « problème à résoudre » (Vezinat, 2019). Ainsi, les minima sociaux coûteraient « un “pognon de dingue” et seraient inefficaces » pour lutter contre la pauvreté, le chômage, le déficit budgétaire et la dette publique. Ce paradigme emprunte en partie un langage et des comportements pratiques issus de l’entreprise et du New Public Management (Bezes, 2012)