Emmaüs

Les communautés Emmaus en Europe

Le mouvement associatif Emmaüs, fondé en France par l’abbé Pierre en 1949, a créé une structure singulière permettant à la fois la protection sociale et l’emploi des populations exclues : les communautés Emmaüs. Celles-ci pratiquent une activité de récupération et de valorisation de déchets d’équipements électriques et électroniques et d’objets de seconde main et oeuvrent également à l’hébergement et à l’insertion de populations exclues. La singularité de leur modèle économique repose sur une hybridation des formes d’organisations et sur une flexibilité au niveau de la gestion des ressources humaines. Soumise à des obligations de rentabilité économique et de protection sociale, la rationalité des communautés en France, en Espagne et au Royaume-Uni évolue selon leurs positions sur différents marchés. Les valeurs du mouvement constituent maintenant une limite au développement de ce modèle. Le mouvement français s’est moins adapté aux règles du marché, ce qui a un impact sur l’intégration des principaux acteurs et bénéficiaires : les compagnons.

Numéro de revue: 
332
Année de publication: 
2014
Auteur(s): 
Joël Ambroisine

Emmaüs et l’abbé Pierre

Axelle Brodiez-Dolino. Presses de Sciences Po, Paris, 2008, 378 p.

Cet ouvrage introduit à ce qui constitue la plus grande organisation de solidarité française (269 millions d’euros de budget en 2005), en partie internationalisée, et construite derrière la figure historique de l’abbé Pierre et la communauté, comme « utopie réinventée » (p. 47). « La communauté est d’abord un lieu de travail, économiquement parce que les ramassages et la chine sont le principal revenu, et idéologiquement car le travail “remet les hommes debout”. Dans la plupart des communautés se trouve ainsi un écriteau portant l’une ou l’autre phrase édictant la deuxième règle d’Emmaüs : “Ici, tu n’es pas à l’asile. On est des hommes debout. On travaille, on gagne son pain, au service de ceux qui sont plus malheureux que nous” » (p. 172). En 1973, les quarante-sept communautés de France ont traité 30 000 tonnes de matières premières, soit un dixième de la récupération alors recensée en France (p. 176). Cet engagement se veut également transformateur. Pour faire face au problème de logement, l’Emmaüs des débuts devient une entreprise de constructions largement illégales. Une anecdote rapportée de l’abbé Pierre le souligne (p. 46), « ce n’est pas aux hommes de s’écraser devant la loi. C’est à la loi de, sans cesse, se changer pour répondre aux droits des hommes, en commençant par les plus petits ».