Un débat fondateur de l’économie sociale reprend actuellement une nouvelle vigueur : l’articulation entre l’indépendance des organisations et le besoin de financements. Le débat est particulièrement vif et complexe dans les organisations dont l’équilibre financier est lié à la puissance publique, c’est-à-dire une large partie du mouvement associatif.
Ce numéro 309 propose une quadruple exploration de cette question en France, en Hongrie, au Portugal, dans les pays en développement. Viviane Tchernonog met en évidence les surprenantes évolutions du secteur associatif français, en particulier au regard des financements publics et du bénévolat.
Pascal Perrot montre qu’au-delà de la complexité des partenariats se met en place un mode de contractualisation de plus en plus formel qui questionne le projet associatif lui-même.
A partir d’une contribution présentée au dernier colloque de l’Addes, Eva Kuti souligne le rôle déterminant du Fonds civil national hongrois, qui permet un financement public qui ne compromet pas l’indépendance des associations, une innovation que la France pourrait reprendre. Eva Kutti souligne également une évolution encourageante de la conception du secteur non lucratif vers une conception d’économie sociale.
Alcides A.Monteiro étudie les associations pour le développement local, dont le nombre a explosé au milieu des années 90 au Portugal. Ces initiatives témoignent de l’essor d’associations d’intérêt général largement soutenues par des financements publics, que l’on retrouve, sous une forme ou une autre, dans toute l’Europe de l’Ouest.
Maxime Haubert analyse les organisations rurales dans les pays en développement entermes de rapports entre acteurs, dont l’acteur public. Cette approche permet de souligner l’importance des concessions que les acteurs doivent faire afin que l’organisation fonctionne. Elle montre également que les organisations rurales ne peuvent pas travailler seules : les liens tissés avec les acteurs privés et publics sont déterminants pour leur action.
Ces cinq contributions nous invitent à considérer les associations, et par extension l’économie sociale, non simplement pour elles-mêmes, mais comme des réponses originales à des questions qui intéressent l’ensemble de la société et qui, pour cette raison, concernent également la puissance publique. Le caractère sociétal des enjeux fonde la légitimité des associations, en tant qu’émanation de la société civile, à revendiquer leur indépendance tout en bénéficiant du soutien de la puissance publique.
Sylvie Mosser, rédactrice en chef adjointe depuis dix ans, quitte la Recma. Les rédacteurs associés lui ont rendu un hommage unanime le 17 juin dernier. Je me fais l’écho du comité en remerciant Sylvie Mosser de son professionnalisme, de son ouverture d’esprit et de sa constante aménité, en lui redisant le plaisir que j’ai eu, comme chacun, à travailler avec elle.
Jean-François Draperi