SIAE : entre capitalisme et économie sociale
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Les relations entre grands groupes et structures d’insertion par l’activité économique – les SIAE- trouvent un nouveau souffle, en partie grâce à la clause d’insertion dans les marchés publics. A côté des fondations d’entreprise, qui soutiennent depuis longtemps les actions contre l’exclusion, de nouvelles formes de partenariats voient le jour pour permettre aux grands comptes de répondre à leurs obligations en matière de ressources humaines et de faire preuve de volontarisme : sous-traitance et co-traitance, joint-venture à vocation sociale… Mais certains professionnels craignent de voir les grands groupes faire de l’insertion un marché comme un autre, au détriment de sa vocation première. Un très bon article (très nombreux exemples, présentations des points de vues critiques de J.F. Draperi ou M. Defalvard...) d'Andrea Parrachini pour le Nouvel économiste
Tremplin vers l’emploi pour des personnes qui en ont été longtemps écartées, les structures d’insertion par l’activité économique (SIAE) ont toujours tissé des liens étroits avec le tissu industriel. Un rapprochement qui remonte à bien avant qu’on ne commence à parler de Responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Il suffit de jeter un œil à la composition des conseils d’administration de certaines SIAE historiques pour s’en assurer : dans celui du groupe Vitamine T, créé il y a 30 ans aux portes de Lille, siègent des pointures de l’industrie française, comme Bruno Bonduelle, Yves Claude d’Oxylane, Maxime Holder de Paul, ou encore Vianney Mulliez pour Auchan.
Quant au groupe bourguignon Id’ees, il est adhérent du Medef et 60 % de son capital est détenu par de grandes firmes du CAC40 comme Sodexo, Sita-Suez, la Macif, Ag2r ou April Group.
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Le spectre de la dérive libérale
Le cas de la Petite Reine est un exemple extrême et assez rare. “En règle générale, les entreprises se méfient, craignent de devoir faire face à des problèmes de compétences, de qualité de production, de résultats”, explique André Dupont, président de Vitamine T, qui compte déjà plusieurs joint-ventures. Pour les rassurer, beaucoup misent sur le statut. En effet, les filiales des groupes Vitamine T, la Varappe, Ares et Id’ees sont quasi exclusivement des sociétés par actions simplifié SAS. “Le statut associatif est ambigu lorsqu’on veut se tenir au milieu des entreprises”, défend Pierre Choux.
“Si on avait été une Scop, Schneider ne serait pas venue” lui fait écho Laurent Laïk, également président du CNEI. Un constat qui inquiète Jean-François Draperi, directeur de recherche au Cnam et auteur de L’économie sociale et solidaire : une réponse à la crise ? Capitalisme, territoires et démocratie (ed. Dunod) : “Dans l’IAE il n’y a pas d’analyse et de remise en question des mécanismes de l’économie libérale. Au cœur des préoccupations de ces structures il pourrait alors, un jour, ne plus y avoir la personne en exclusion, mais des problèmes de gestion des ressources, de ROI ou d’accès aux fonds”.
Elles pourraient par exemple trier à l’entrée les candidats pour s’assurer une meilleure compatibilité avec les “profils” de l’entreprise. C’est ce que craint Hervé Defalvard, maître de conférences à l’Université de Marne-la-Vallée et responsable de la chaire Economie sociale et solidaire (ESS). Et Jean-François Draperi d’alerter : “Formidable occasion pour le développement de l’ESS, l’insertion deviendrait alors un marché comme un autre pour les grands groupes”.
Quelques exemples montrent pourtant qu’économie sociale, gouvernance démocratique et grands groupes peuvent faire bon ménage. Nichée au cœur du Jura, l’entreprise d’insertion Juratri a été créée, en 1993, avec la participation de Derichebourg, Veolia et Sita, toutes trois spécialistes – entre autres – de l’environnement et de la gestion des déchets. “En 2009, lorsqu’on est passé au statut de Scop, Veolia est parti mais pas les autres, alors qu’ils savaient qu’ils auraient eu moins de pouvoir qu’avant”, se souvient Mathieu Grosset, responsable du développement.
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