Les 6 èmes rencontres du GESS soulèvent la question de la soutenabilité
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Les rencontres du GESS (Gestion des entreprises sociales et solidaires) sont des moments d’échange et de réflexion importants pour les chercheurs en sciences humaines et sociales (académiques ou praticiens) partageant l’ambition d’une approche renouvelée sur les pratiques de gestion à partir d’un regard venu de l’économie sociale et solidaire (ESS). En se focalisant sur la gestion des coopératives, des mutuelles, des associations ou encore des entreprises sociales – plus généralement des organisations de l’ESS –, l’objectif est d’ouvrir le débat sur des pratiques de gestion alternatives et de construire des modèles susceptibles de faire face aux défis d’aujourd’hui. Parmi ceux-ci, la question d’un développement plus juste et plus durable - soutenable - est essentielle.
Les 6 es rencontres du GESS se sont tenues les 10 et 11 décembre 2018 à l’Institut d’administration des entreprises (IAE) de Paris. Elles ont été rendues possible par la mobilisation des membres actifs du GESS et le soutien de partenaires académiques, parmi lesquels le Groupe de recherche en gestion des organisations (Gregor), trois chaires de l’IAE de Paris (Entrepreneuriat-Territoire-Innovation, Mutations-Anticipations-Innovations, Management et gouvernance des coopératives financières) et l’Institut de recherche en gestion de l’université Paris-Est. Des acteurs de terrain ont également contribué à la réalisation du projet : la MGEN, France Active et Juris Associations. Les rencontres ont été précédées par un atelier doctoral d’une demi-journée, qui a rassemblé une quinzaine de doctorants de disciplines différentes autour de thématiques comme la finance solidaire, l’holacratie, les organisations hybrides, la justice organisationnelle ou les organisations multi-parties prenantes, démontrant la richesse et la vitalité des problématiques traitées.
Croiser les perspectives sociale et environnementale
Pour ces rencontres, le thème retenu était le suivant : « ESS, communs, organisations alternatives : la gestion solidaire peut-elle fédérer autour d’une plus grande soutenabilité ? ». Pour les organisateurs, il s’agissait de croiser les perspectives sociale et environnementale, de réfléchir à leur résolution conjointe et de souligner l’urgence de renouveler les modèles économiques. Comme cette transformation ne peut se réaliser sans allier la réflexion au savoir-faire, les participants ont été invités à conjuguer leurs efforts pour rendre compte des outils – conceptuels et pratiques – nécessaires à la transition écologique et sociale. Ils ont mis en lumière la nécessité d’une non-dissociation des moyens et des fins, pour une meilleure cohérence entre les projets et les valeurs.
Nathalie Raulet-Croset (IAE de Paris) a ouvert les rencontres en saluant la richesse des quarante-cinq articles de recherche au programme des journées. Puis, la première table ronde plénière, animée par Philippe Eynaud (IAE de Paris), a souligné la nécessité de mobiliser les sciences de gestion face aux enjeux de la transition sociale et environnementale, tout en rappelant que la question de la soutenabilité n’est pas simple à traiter : l’exploitation abusive des ressources naturelles met en danger l’équilibre du climat etde la biodiversité, et les inégalités croissantes condamnent notre capacité à faire société. Dès lors, les questions sociale et environnementale ne peuvent être dissociées. L’espoir est que les sciences de gestion puissent contribuer à l’affirmation d’une double solidarité : celle qui relie les hommes et la nature, et celle qui unit les hommes entre eux. Un tel effort ne se décrète pas, il s’organise. Et c’est là que l’apport de la recherche sur ces questions est déterminant.
Jean-Louis Laville (Cnam) a appuyé ce propos en brossant le portrait de l’ESS et en montrant la complémentarité entre les travaux de recherche sur l’économie solidaire et ceux portant sur la gestion solidaire. Genauto Carvalho de França Filho (Université fédérale de Bahia) a montré la pertinence d’initiatives démocratiques telles que les banques communautaires et les incubateurs solidaires pour la transition sociale et environnementale.
Corinne Gendron (Université du Québec à Montréal) a souligné que l’impératif écologique a des incidences différentes selon les organisations et que la sensibilité environnementale est l’occasion de renouveler les cadres de la gestion et d’insuffler un sens nouveau au travail. Enfin, Corinne Vercher-Chaptal (Paris-13) a témoigné d’un projet de recherche sur l’émergence de plateformes numériques inscrivant leur action dans une réponse aux enjeux sociaux et sociétaux.
S’appuyer sur une multiplicité d’initiatives solidaires
En renforçant la légitimité du champ de l’ESS, la loi de juillet 2014 a donné de la visibilité aux nombreuses expériences et initiatives qui conjuguent les dimensions sociale et environnementale. Ainsi, les sociétés coopératives d’intérêt collectif, les coopératives d’activités et d’emploi, les ressourceries, les jardins partagés, les Amap, les circuits courts, les espaces de coworking, les fablabs, les initiatives autour de l’écoconstruction, de l’habitat participatif, de la permaculture, de la lutte contre la précarité énergétique, de la mobilité durable ou du commerce équitable sont autant d’exemples qui participent conjointement d’un engagement économique et citoyen dans la transition sociale et environnementale. La deuxième table ronde plénière a donné un écho à cette diversité d’expériences.
Géraldine Schmidt (IAE de Paris) a sollicité le témoignage d’acteurs engagés. Jacky Blanc (ancien président du directoire de la NEF, cofondateur et membre actuel de la gérance de la Foncière Terre de liens), Flora Barré (chargée de la vie coopérative à Enercoop) et Anne Lechêne (cofondatrice de l’écolieu la Ferme de Chenèvre, membre du projet Oasis du mouvement Colibris) se sont relayés à la tribune pour exposer leurs réponses opérationnelles face aux enjeux de la soutenabilité.
Enfin, Amina Bécheur (Paris-Est Marne-la-Vallée) a conclu les journées en invitant à un dialogue entre chercheurs et praticiens. Emmanuelle Maudet (responsable « études et prospectives » à France Active), Christine Chognot (adjointe au directeur général à l’Union nationale interfédérale des œuvres et organismes privés sanitaires et sociaux) et Lionel Maurel (directeur adjoint scientifique à l’Institut des sciences humaines et sociales, auteur du blog S.I.Lex, membre de la Coop des communs) ont répondu à cet appel en témoignant de leur propre expérience. Les journées se sont terminées sur la nécessité de poursuivre et d’approfondir l’articulation des savoirs sur ces questions certes complexes mais déterminantes pour notre avenir collectif.
Philippe Eynaud
Liens vers les vidéos pour revivre les journées :
http://podcast.u-pem.fr/channelcatmedia/13/MEDIA190204103154761
http://podcast.u-pem.fr/channelcatmedia/13/MEDIA190204103427852
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