Modifier la constitution pour reconnaître les communs ?

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Alors que, le 10 décembre 2020, une proposition de révision de la Constitution était discutée au Sénat pour y intégrer la notion de bien commun, soulevant des réticences de la part d’un certain nombre de sénateurs craignant qu’une telle reconnaissance limite la liberté d’entreprendre, le séminaire de clôture d’un projet de recherche ayant duré quatre ans, « Entreprendre en communs », qui a mobilisé quatre équipes d’universitaires et de chercheurs coordonnées par Benjamin Coriat, avait permis de réfléchir à cette question, du 18 au 20 novembre.
La présentation d’Aurore Chaigneau (Université de Paris Nanterre), « L’entreprise comme commun ou l’entreprise au service du commun ? », permettait de mieux saisir les questions soulevées par cette actualité et les options possibles pour l’avenir. En préambule, la chercheuse a souligné deux points.
Tout d’abord, pour savoir si l’entreprise, qui est un collectif, peut également être considérée comme un commun, une réflexion sur sa forme juridique est nécessaire. De ce point de vue, l’ESS montre qu’un lien est possible entre des formes statutaires et juridiques spécifiques et le développement de l’activité sur la base d’autres principes et finalités que ceux des sociétés commerciales. Ainsi, de nouvelles formes d’entreprise émergentes, comme les plateformes collaboratives, cherchent à s’arrimer à l’ESS pour y puiser une organisation, une structure qu’elles n’ont pas encore déterminée. Quant à la loi Pacte, comme le rapport Sudreau précédemment, elle tente de contractualiser des enjeux, de faire de l’entreprise un objet juridique touchant à son noyau, à ce qui la constitue en interne.
À partir de là, une seconde réflexion s’ouvre car l’entreprise a aussi un impact sur l’emploi, les relations internationales, le territoire, la santé, etc. Ses effets débordent de sa structure juridique : les économistes parlent d’externalité positive. Il serait logique, alors, qu’elle se mette au service des communs (ce qui, en retour, aiderait à sa reconfiguration). Pour cela, deux voies sont possibles :

  • - La constitutionnalisation des communs (ou des biens communs) afin que des normes qui surplombent l’ordre juridique s’imposent aux agents économiques (et à tous). Cette approche a été suggérée par le Conseil constitutionnel en janvier 2020 dans une décision relative à l’exportation de produits chimiques interdits sur le territoire européen : en considérant que l’environnement constitue un patrimoine commun universel, le Conseil constitutionnel a justifié d’une atteinte à la liberté d’entreprendre et interdit ces exportations. Dans cette approche, la qualification des différents biens communs (la santé, le territoire, l’environnement, etc.) va cependant très vite générer des difficultés pour hiérarchiser les règles s’imposant aux entreprises, car celles-ci interviennent à la fois sur un territoire, la santé des personnes, l’environnement, l’emploi, etc.
  • - L’autre approche consiste à créer des enclosures en réglementant autrement les activités économiques, ce qui nécessite de dépasser l’opposition public/privé. Produire des enclosures signifie qu’il ne faut plus considérer que tout agent économique puisse intervenir sur tout marché. Là encore, l’ESS a déjà réalisé la segmentation de marchés en accordant des droits différents à certaines structures dont les objectifs sont reconnus comme plus valables pour y opérer. De même, on voit se développer des clauses RSE (responsabilité sociétale des entreprises) et développement durable dans les marchés publics. Mais cette fois-ci, au sein des enclosures, se pose la question du contrôle de ces agents économiques, qui doit être assuré par la société civile (associations, ONG...) plutôt que par l’État, pour évaluer de façon experte l’entreprise et son comportement dans la sphère sociale.