La disoccupazione come problema sociale : riformismo conflitto e « democrazia industriale » in Europe prima e dopo la Grande guerra
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Maria Grazia Meriggi. Milano, Franco Angeli, 2009, 216 p.
A l’heure où la plus grave crise économique mondiale survenue depuis 1929 jette des millions de travailleurs au chômage, il faut rappeler que les mouvements d’économie sociale ont leur rôle à jouer sur l’emploi et le marché du travail, ainsi que dans la protection sociale. Ils y interviennent depuis plus d’un siècle, même si on ne le sait pas assez, et c’est pourquoi leurs responsabilités restent considérables aujourd’hui. On le comprend mieux à la lecture de ce livre de Maria Grazia Meriggi, à qui nous sommes déjà redevables d’une remarquable synthèse sur les rapports entre coopération et mutualité en Europe au début du XXe siècle.
L’économie sociale et l’Etat au XIXe et au premier XXe siècle
Aux débuts de la révolution industrielle, travailleurs et pauvres furent confondus sous le même opprobre de « classes dangereuses ». Puis, le chômage commença à être considéré de façon spécifique à la fin du XIXe siècle: un nombre croissant de travailleurs obtenaient alors peu à peu par des voies contractuelles une amélioration de leurs conditions de travail, et d’abord une plus grande stabilité de l’emploi. Dans la quinzaine d’années qui précéda la Grande Guerre, cette question fut au centre des préoccupations d’une « nébuleuse réformiste » constituée de partis et d’associations de toutes sortes qui se situaient dans la mouvance du radical socialisme dont Léon Bourgeois fut l’un des grands porte-parole. La notion de classes dangereuses disparut en Europe et des solutions furent recherchées pour trouver des solutions aux risques entraînés par la perte du travail: mutuelles, coopératives et associations y intervinrent. Ce débat coïncida avec les débuts d’une généralisation de la protection sociale : coopératives et mutuelles apprenaient, non sans difficultés, à coopérer avec l’Etat, qui s’engageait peu à peu sur ce terrain.
Après la Grande Guerre, la discussion fut reprise à un niveau plus élevé par les organisations nouvelles – Organisation internationale du travail (OIT), Bureau international du travail (BIT) – qui, nées du traité de Versailles, se consacrèrent à l’emploi et à la protection sociale. Comme le montre l’histoire des assurances sociales en Europe, le débat fut mené dans ces instances et au sein des mouvements d’économie sociale. Puis, à partir de la Libération, l’Etat accrut encore son rôle en matière d’emploi et de protection sociale, ce qui n’empêcha nullement coopérateurs et mutualistes de continuer à s’investir fortement dans ces domaines.
Construction européenne et retour de la question sociale
Une telle histoire ne doit pas être oubliée. Aujourd’hui, la crise économique a au sein de l’Union européenne, pour ne parler que d’elle, des effets sociaux dramatiques: cent millions de personnes y vivent dans la pauvreté – dont 48 % dans l’Europe des Quinze – et le nombre de travailleurs pauvres ne cesse d’y augmenter, puisqu’ils sont plus de 10 % en Espagne et en Italie. Et ce, à l’heure où les instances européennes (Commission, Conseil, Parlement) continuent d’imposer, comme elles le font depuis trente ans, la flexibilité dans l’organisation du travail. La flexibilité entraîne une dégradation des statuts des travailleurs de la fonction publique comme des salariés du privé, allant de pair avec une réduction de leur rémunération.
Le droit du travail est également remis en cause depuis qu’en 2005 la Commission européenne a jugé nécessaire de le « moderniser ». Depuis, à travers des mesures nationales (comme les diverses réformes qui, en France, ont déstabilisé le Code du travail) ou par le biais de l’Union européenne, le droit du travail et le droit syndical ont subi de violentes attaques de systèmes politiques qui se réclament pourtant de la démocratie. De plus, la majorité des décideurs politiques de l’Union européenne et de ses Etats-membres laissent le patronat mener à bien cette régression sociale. Il en résulte dans toute l’Europe une dégradation des droits du travailleur: affaiblissement du contrat de travail à durée indéterminée, présenté comme obsolète ; disparition programmée du statut de fonctionnaire ; affaiblissement des protections contre le licenciement ; réduction des retraites, etc. La gestion libérale de l’emploi provoque des dégâts sociaux, comme on le voit aujourd’hui de façon dramatique avec la vague de suicides, survenue chez France Télécom, de salariés soumis à des conditions de travail dignes de temps que l’on croyait révolus. On assiste enfin au même moment à un désengagement de l’Etat dans le domaine de la protection sociale : tout le chemin parcouru depuis le début du XXe siècle jusqu’aux années 70 semble être fait en sens inverse.
Sauf à laisser de tels terrains à l’initiative privée (patronat, compagnies d’assurances), les mouvements d’économie sociale ne doivent-ils pas s’y investir encore davantage ? A eux d’apporter des réponses à ces défis : tout ce qu’ils ont fait depuis des décennies leur donne le droit de le faire. On ne saurait donc trop conseiller la lecture de ce bel ouvrage qui renvoie à l’actualité la plus immédiate.
Michel Dreyfus
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