Entre travail éducatif et citoyenneté : l’animation et l’éducation populaire
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Francis Lebon, Champ social, 2020, 196 pages
L’école occupe une place importante dans notre société. La scolarité des nouvelles générations dure aujourd’hui en moyenne une vingtaine d’années. Avec la famille, c’est l’un des principaux espaces d’apprentissage et de socialisation. Mais tout ne se joue pas là pour la jeunesse. Dans les marges de l’école et de la famille, l’animation et l’éducation populaire ont aussi un rôle indéniable dans l’encadrement, l’éducation et la socialisation des enfants.
C’est à cet espace situé « entre travail éducatif et citoyenneté » que s’intéresse ici le sociologue Francis Lebon, professeur en sciences de l’éducation à l’Université Paris-Descartes (Cerlis, CNRS) et déjà auteur d’un ouvrage de référence sur le sujet (1).
Dans ce livre tiré de son habilitation à diriger des recherches (HDR), Francis Lebon commence par présenter la tradition de recherche dans laquelle il s’inscrit. Nous retrouvons ainsi dans l’introduction les noms des auteurs incontournables sur le sujet, qui ont parfois consacré leur vie à l’explorer, comme Joffre Dumazedier, et d’autres que l’auteur a côtoyé comme Geneviève Poujol, Françoise Tétard ou encore Jean-Pierre Augustin et Jean-Claude Gillet.
L’auteur présente également son parcours de recherche, certains de ses travaux récents et la posture épistémologique qui l’a conduit à s’intéresser principalement aux travailleurs « prolétaires » de l’animation. L’ouvrage se divise ensuite en trois parties. Dans la première, Lebon se penche sur la structuration de ces espaces éducatifs que sont l’animation et l’éducation populaire, et leur institutionnalisation autour du secteur « jeunesse et éducation populaire ». Il montre que, si ce secteur a son ministère, c’est essentiellement au niveau municipal qu’il se déploie, et qu’il est largement adossé au monde associatif organisé. Dans ce chapitre, l’auteur s’attarde aussi à décrire les différents acteurs qui représentent l’éducation populaire et les liens « ténus », plus ou moins distanciés, qu’entretiennent les associations du secteur avec le champ syndical et politique.
La deuxième partie du livre est centrée sur la figure des professionnels de l’animation. Il décrit ce groupe aux frontières incertaines et revient sur la diversité des métiers et des pratiques. Il répond également à de nombreuses questions permettant de mieux cerner cet espace professionnel. Comment le travail d’animation s’articule-t-il avec le travail militant ? Qui sont les animateurs ? Quelle est leur formation ? Où sont-ils et que font-ils ?
Enfin, dans sa troisième et dernière partie, « L’animation à la rescousse de l’école », Francis Lebon s’intéresse à la réforme des rythmes scolaires de 2008 et aux réflexions qu’elle suscite sur la place de l’animation à l’école, la division du travail à l’école primaire du point de vue des professionnels de l’éducation, etc. Il revient également sur les controverses scientifiques concernant les effets pour les enfants de ces temps périscolaires en termes d’apprentissage et de socialisation.
L’ouvrage ne manquera pas d’intéresser ceux qui travaillent dans le secteur de l’animation et de l’éducation populaire, ou réfléchissent aux tensions qui s’y exercent. Car tout au long de l’ouvrage – et c’est d’un intérêt certain pour la réflexivité –, l’auteur interroge les frontières qui traversent et/ou entourent cet espace éducatif. Entre public et privé. Entre éducation populaire et animation, militantisme et profession. Entre travail social et engagement. Entre savoirs disciplinaires et compétences non académiques des animateurs. Entre école et animation. Entre savoir et culture, éducation et social, éducation formelle et informelle, etc.
Un bémol cependant. On retrouve dans cet ouvrage riche de réflexions la logique de l’HDR, un exercice universitaire où le chercheur retrace son parcours scientifique et intellectuel. Un fil conducteur qui pourrait dérouter les personnes peu familières des travaux sur l’animation et l’éducation populaire, même s’il offre au lecteur un tour d’horizon des connaissances et discussions sur ce sujet dont Francis Lebon est une référence incontournable.
Simon Cottin-Marx
(1) Francis Lebon, Les Animateurs socioculturels, La Découverte, « Repères », Paris, 2009.
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