"Économie politique de l'Asie", appel à contributions pour la Revue de la régulation, jusqu'au 25 mai 2012
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« Économie politique de l'Asie ». Ce dossier offre une chambre d’écho, dans une revue d’économie généraliste, aux recherches, anciennes et récentes, en économie politique sur l’Asie. Les points 1 et 2 au moins intéressent potentiellement l'économie sociale.
On sait qu’en plein Consensus de Washington néolibéral la Banque mondiale fut forcée de reconnaître le rôle positif joué par les États respectifs dans le Miracle Asiatique (1993). En effet, l’Asie pourrait apparaître comme le terrain où l’hétérodoxie économique a gagné et où ont œuvré des États développeurs (Chalmers A. Johnson, Japan : Who Governs ? – The Rise of the Developmental State, 1995). Mais, depuis vingt ans la Chine au socialisme de marché occupe une place grandissante dans l’économie régionale, ce qui modifie la donne en accusant le trait : on peut se demander si le débat entre État et marché n’est pas déjà révolu en Asie, pour laisser place à d’autres questions, à la fois plus circonscrites et plus circonstanciées.
L’extraordinaire puissance du développement chinois ne doit pas occulter, du point de vue de la recherche, la variété des systèmes économiques et des formes institutionnelles qui composent cette région, zone immense composée par l’Asie du Sud, l’Asie du Sud-Est et l’Asie orientale.
Plusieurs thèmes de recherches nous semblent pouvoir alimenter ce dossier :
1. La question du rôle de l’État
Les travaux pionniers et déterminants de Peter Evans, T. Sckokpol et E. Rushmeieir (Bringing the State Back In, 1985), K. S. Jomo (A Question of Class, Capital, the State, and Uneven development in Malaya, 1988), Robert Wade (Governing the Market, 1990), d’Alice Amsden (Asia’s next Giant, South Korea and Late Industrialization, 1992), ou plus récemment d’Ha Joon Chang (Institutional Change and economic Development, 2007) nous semblent trop peu connus, ou en tous les cas rarement cités en dehors des publications proprement consacrées au développement asiatique. Or ils ont fortement participé à l’essor d’un institutionnalisme (non northien) en économie politique contemporaine américaine, britannique et asiatique. Leurs travaux articulent des recherches sociologiques, économiques, politistes et historiennes d’une manière différente, et néanmoins très proche, de la pratique de recherche française (pour ne pas dire de la nouvelle tradition institutionnaliste). Leur synthèse comparative reste à faire en français.
D’autre part, la poursuite de l’analyse de « l’État développeur » en Asie peut trouver son expression à travers l’étude de politiques économiques au long cours, en particulier le rôle des programmes de planification indicative ou centralisée, en Asie. D’autre part, la crise de 1997 et les réponses différenciées des États face aux recommandations et conditions posées par le FMI, peuvent être comparées aux réactions publiques récentes face aux effets de la crise des subprimes. Le désengagement versus l’engagement supplémentaire de l’État dans l’activité économique selon les pays reste largement à caractériser, à expliquer, à comparer.
Enfin pour affiner l’analyse parfois schématique et réductrice de ces « États développeurs », l’étude des appareils bureaucratiques respectifs, de la transformation en cours des instruments du pouvoir, sous l’effet de la mondialisation des normes de gestion publique (dont les vecteurs concrets restent à identifier), mais aussi de la diffusion de normes issues du modèle chinois, devrait aussi être un terrain à explorer.
2. Entrepreneuriat et pouvoir politique
La question de la caractérisation des capitalismes en Asie est un sujet à la fois récurrent, pluridisciplinaire et cette perspective est stimulante pour le courant régulationniste. Dans une région où, pour illustrer l’étroite combinaison des aspects institutionnels, politiques et sociologiques, très tôt, de formes singulières de capitalismes furent identifiées : le Crony Capitalism (« capitalisme de copinage », mettant à jour les collusions d’intérêt entre classes politiques et milieux d’affaire) ou le State capitalism. La question du clientélisme et du patronage politique de l’économie est un chantier largement ouvert (en Malaisie depuis les années 1990s : Malaysia’s political economy : politics, patronage and profits, T. Gomez et Jomo, 1999). À la lumière des fortes avancées théoriques récentes portées par B. Hibou (Anatomie de la domination, 2011) mais aussi en soulignant l’apport des classes d’entrepreneurs comme l’avait montré pour Taiwan G. Guiheux (Les grands entrepreneurs chinois à Taiwan, 2002) il conviendrait de prolonger les recherches dans cette voie.
3. Conséquences nationales de l’intégration régionale
La rapidité de l’insertion dans la mondialisation des économies émergentes d’Asie, leur diversité (en termes de niveau de vie, de taille, de spécialisation) et leurs étroites interrelations posent de nombreuses questions académiques. Par exemple, l’évolution de la place relative du Japon. Celles-ci s’expriment en termes d’intégration régionale, cf. Yang Jiang (Sub-regional Economic Integrations, 2011), John Ravenhill (The ‘New East Asian Regionalism’, a political domino effect, 2010). Approfondir les connaissances à ce titre semble intéressant avec un accent mis sur le lien avec le développement local des différents pays. Le développement local participe à la diversité des systèmes économiques singuliers.
4. Les effets de la puissance chinoise
Par rapport à l’intégration régionale et mondiale comme le montrent R. Boyer (How Does China’s Growth and Innovation Strategy Affect the World Economy ?, 2010) ou Yang Jiang (China’s Move to Preferential Trading, 2009), le poids de la Chine est sans doute à traiter à part. Les effets locaux de la nouvelle puissance chinoise sont innombrables et parfois extrêmement sensibles. Qu’elle se fasse sentir par l’intermédiaire du commerce, des investissements, des multinationales, de la coopération économique ou de la diffusion de nouvelles normes économiques et politiques, dans le paysage régional, la Chine est aujourd’hui l’un des plus forts vecteurs de changements économiques et sociaux.
5. La mutation rapide des sociétés asiatiques
Il sera enfin possible d’alimenter ce dossier Asie avec des textes portant sur certains des nouveaux enjeux contemporains liés à l’évolution des sociétés asiatiques. Id est : l’amélioration des conditions de vie, la dynamique des inégalités, les migrations, l’écologie, l’urbanisation ou encore la transformation des sociétés agraires en cours (thèmes donnés à titre indicatif mais non limitatif).
Les articles soumis ne doivent pas dépasser 10 000 mots (notes, références bibliographiques, annexes, tableaux et figures inclus). Les articles doivent être envoyés à regulation@revues.org. Merci d’adresser vos propositions d’articles avant le 25 mai 2012.
Responsables du dossier : Pierre Alary et Elsa Lafaye de Micheaux
Date limite de réception des contributions : 25 mai 2012
Les contributions devront être transmises à regulation@revues.org
"The Political Economy of Asia"
This call for papers seeks to establish an echo chamber in a generalist journal for old and new studies of the political economy of Asia. Although one can argue that heterodoxy has triumphed in Asia, it is also unquestionably the region of the world in which the concept of developmental state has the most meaning (Chalmers Johnson, Japan: Who Governs? – The Rise of the Developmental State, 1995). At the height of the Washington Consensus, the World Bank recognized--albeit through gritted teeth--the beneficial role played by various regional governments in the Asian Miracle (1993).
For twenty years, China’s market-based socialism has given it increasing prominence in the region’s economy, changing the game-plan by raising the stakes considerably. China’s ascendancy in turn raises the question of whether the state-versus-market debate in Asia has not ended, leaving the field open to other questions that are both more circumscribed and more relevant. In research terms, the extraordinary power of Chinese development should not overshadow the variety of economic systems and institutional forms that make up the region, a vast zone that encompasses South Asia, Southeast Asia, and East Asia.
Several research strands seem to us to energize this theme:
1. The Role of Governments
Pioneering studies by Evans, Rueschemeyer and Skocpol (Bringing the State Back In, 1985), Jomo (A Question of Class, Class, Capital, the State, and Uneven development in Malaya, 1988), Wade (Governing the Market, 1990), Amsden (Asia’s next Giant, South Korea and Late Industrialization, 1992) and more recently Ha-Joon Chang (Institutional Change and economic Development, 2007) are not widely known in France, or are at least too seldom cited outside of publications specifically focused on Asian development. Furthermore, these authors have participated in the rise of non-Northian institutionalism in contemporary American, British, and Asian political economics. Their studies articulate sociological, economic, political, and historical research in a different way than does the more youthful research of French scholars in the field, despite certain similarities. In any event, a comparative synthesis such as these authors have performed has not yet been published by French-language researchers.
Case studies of the “developmental state” in Asia could also contribute, especially longitudinal studies of political economies, particularly of the role of central planning in Asia – for example in India, Malaysia, etc.
The 1997 crisis and the different responses of governments to the IMF’s recommendations and conditions could be compared to recent public reactions to the effects of the subprime crisis. The consequent disengagement or engagement of governments in economic activity also raises numerous questions that deserve attention.
Finally, the study of the different national bureaucracies and the on-going transformation of the instruments of power due to the globalization of norms of public management (whose actual vectors have yet to be established), but also of the spread of norms originating in the Chinese model, constitute a field that is ripe for exploration.
2. Entrepreneurship and Political Power
How Asian capitalisms are portrayed is a recurrent, pluridisciplinary theme is a perspective that has been stimulating to the regulationist movement. Asia is a region in which, in order to illustrate the close combination of institutional, political, and sociological factors, singular forms of capitalism were identified very early on. These include Crony Capitalism, which reveals the collusion between political classes and business people, and State capitalism.
The role of political patronage in economies is an additional wide-open research field (for example in Malaysia since the 1990s: Malaysia’s political economy: politics, patronage and profits, T. Gomez et Jomo, 1999). Studies could also fruitfully pursue lines of inquiry derived from B. Hibou’s powerful recent theoretical advances in Anatomie de la domination (2011) as well as from the contributions of the entrepreneurial class as described by Guiheux in Les grands entrepreneurs privés à Taiwan – La main visible de la prospérité (2002).
3. The National Consequences of Regional Integration
The rapidity of the integration of emerging Asian economies into globalization, their diversity in terms of standard of living, size, and specialization, and their close inter-relationships raise new research questions. The evolution of the japanese relative position is also to be questioned. Such questions could be expressed in terms of regional integration, as has been done by Yang (Sub-regional Economic Integrations, 2011), J. Ravenhill (The New East Asian Regionalism, a political domino effect, 2010). Contributions to knowledge of these topics is interesting to the extent that it emphasizes links to local development across countries, which is important because local development is a dimension of the diversity of singular economic systems.
4. The Effects of Chinese Power
As Boyer (How Does China's Growth and Innovation Strategy Affect the World Economy? 2010) and Yang (China’s Move to Preferential Trading, 2009) have shown, China’s dominance unquestionably deserves separate treatment in terms of regional and global integration. The local effects of the new Chinese power are numerous and occasionally highly sensitive in nature. Whether its influence is expressed through trade, investment, multinational corporations, economic cooperation, or through the spread of new economic and political norms, China is currently among the strongest vectors of economic and social change in the region.
5. The Rapid Changes in Asian Societies
Finally, our knowledge about the political economy of contemporary Asia could be enhanced by investigations of other changes in Asian societies. Such subjects might include improvements in living standards, the dynamics of social inequalities, migration, ecology, urbanization, as well as on-going transformations of agrarian societies (a non-exhaustive list intended as suggestions).
Articles submitted should be no longer than 10000 words (inclusive of notes, references and any annexes including tables and figures). Articles must be sent to regulation@revues.org. Please address your article before May 2012 the 25th.
Directors: Pierre Alary and Elsa Lafaye de Micheaux
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