Vers des alliances entre économie sociale et « communs »
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Avec les « communs », s’ouvre un champ important d’expérimentations pratiques et théoriques, interpellant celui de l’économie sociale, en rendant compte de la conférence internationale “The City as a Commons”, écrivions-nous dans le dernier numéro de la Recma. Mieux connu depuis l’attribution, en octobre 2009, du prix Nobel d’économie à Elinor Ostrom, le concept de « communs » ou de « biens communs » fait actuellement florès dans de nombreuses disciplines : économie, gestion, droit et science politique, mais aussi dans les programmes de militants et responsables politiques. Le Parlement européen a ainsi constitué un intergroupe dédié aux « services publics et biens communs ».
Surtout, de très nombreuses initiatives témoignent de la vitalité de nouvelles forces sociales du vivre et produire ensemble et autrement. Ces initiatives visent à promouvoir des laboratoires citoyens et économiques dans des domaines tels que l’économie collaborative, la santé, l’éducation, la transition énergétique, le domaine foncier. Elles se nourrissent des logiques de biens communs pour une gouvernance plus démocratique de fourniture de services d’intérêt général et pour élargir les choix dans les partenariats publics-privés.
Le Centre culturel international de Cerisy propose un colloque, du 8 au 15 septembre prochain, sur le thème « Vers une république des biens communs ? (Pour en savoir plus : Ccic-cerisy.asso.fr/bienscommuns16.html) ». Le colloque est conçu comme un carrefour pluridisciplinaire de rencontres et d’échanges entre chercheurs et acteurs venant de plusieurs pays européens et américains, pour discuter le contenu du concept de biens communs et sa capacité à permettre la construction d’une nouvelle manière de vivre en société.
Les intervenants sont attendus sur des thèmes riches et diversifiés comme : la dimension historique et l’actualité des communs dans le développement Nord-Sud ; l’analyse économique et les sciences de gestion, avec notamment les modèles économiques des communs ; les communs et le droit de propriété ; le partage de la valeur et les biens communs ; les communs et le numérique ; le travail et le développement des communs ; la gestion d’un bien commun naturel (l’expérience de Chausey) ; territoires et biens communs ; les biens communs pour produire et consommer ensemble ; les biens communs pour entreprendre et travailler ensemble ; la finance et le concept de commun ; les biens publics mondiaux ; prospérité et diversité des communs dans le monde et, pour finir, la question des communs et de la voie coopérative.
Le colloque a été construit par La Coop des communs. Récemment créée, cette association résulte d’une phase de maturation démarrée en 2011 au sein d’un atelier, lors des Rencontres du Mont-Blanc (RMB) sur les communs (Avec la participation notamment de Frédéric Sultan, militant des communs issu de l’éducation populaire, de David Bollier, auteur de nombreux ouvrages à portée internationale sur le sujet et de Nicole Alix.) . L’échange aux RMB a été repris en 2013, activé depuis 2014 avec Benjamin Coriat, Jean-Louis Bancel et une trentaine de chercheurs et d’acteurs des communs et de l’économie sociale et solidaire (ESS).
La Coop des communs sort de sa phase de préfiguration, qui a réuni des activistes, des militants, des chercheurs, des entrepreneurs de l’ESS et du monde des communs, ainsi que des acteurs publics qui veulent collaborer dans une perspective tournée vers l’action au service des acteurs.
Persuadés qu’alliés, communs et ESS peuvent former de véritables piliers d’un développement soutenable dans une vision plurielle de l’économie, une économie collaborative fondée sur la réciprocité, les porteurs du projet visent à contribuer à la construction d’un écosystème favorable à l’éclosion de communs co-construits avec l’ESS et les pouvoirs publics intéressés.
La dynamique s’appuie sur la grille d’analyse des communs promue par E. Ostrom. Elle associe une ressource, un groupe d’acteurs et un mode de gouvernance (voir B. Coriat [coord.], Le retour des communs, 2015, Les Liens qui libèrent éd.). L’action de la Coop des communs est ancrée dans le cadre français. Elle échange beaucoup avec les pratiques équivalentes dans d’autres pays et contribue à l’émergence de propositions à l’échelle mondiale. Une liste e-mail ESS-Communs permet le débat sur l’actualité de l’ESS et des communs. Des alliances concrètes entre ESS et communs sont ambitionnées pour : alimenter la recherche et les discussions sur les domaines dans lesquels les communs peuvent et doivent se déployer, et sur les modalités sous lesquelles ils peuvent le faire ; promouvoir des laboratoires citoyens et économiques dans des domaines comme l’économie collaborative, la santé, l’éducation, la transition énergétique, le domaine foncier, la ville ; montrer qu’on peut utiliser des logiques de communs pour fournir des services d’intérêt général sur une base démocratique et élargir les choix dans les partenariats publics-privés-communs.
Quatre axes de travail sont en cours de structuration :
• droits de propriété, communs et entreprise : interface avec le programme de recherche « Entreprendre en communs » et le séminaire de recherche coordonné par Benjamin Coriat, Fabienne Orsi et Sébastien Broca ;
• villes, territoires et communs : la « production de la ville » par ses habitants, avec les apports de l’Atlas des chartes des communs urbains(Cet atlas est construit autour de Remix the communs (espace de partage et de co-création de documents multimédias sur les biens communs)) et de l’Ecole des communs de Labsus (Italie), qui aide à la mise en place de pactes des communs urbains avec un nombre croissant de villes ;
• protection sociale et communs : mise en place d’un groupe de travail collaboratif au carrefour de plusieurs préoccupations, notamment l’émergence de nouvelles formes d’activité et d’emploi liées aux communs et à l’ESS, et l’absence de visibilité des « communs mutualistes » dans la recherche de protection sociale associée ;
• communs et services d’intérêt général dans les traités internationaux.
Nicole Alix
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