In memoriam Philippe Frémeaux
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C’est en plein cœur de l’été que Philippe Frémeaux nous a quittés, après avoir longtemps lutté contre la maladie qui a fini par l’emporter à l’âge de 70 ans. Philippe était un militant exigeant de l’ESS, ayant forgé son engagement dans la direction de la Scop Alternatives économiques, où il avait succédé à son fondateur, Denis Clerc. Sans jamais oublier qu’il était journaliste, il avait su faire de ce mensuel et des publications qui l’accompagnent – dont le hors-série « L’économie sociale de A à Z » – une référence, prouvant sa capacité à concilier une exigence éditoriale forte et le maintien d’un équilibre économique dans un secteur – la presse écrite – en difficulté croissante.
C’est parce qu’il croyait profondément aux valeurs caractérisant l’ESS que Philippe s’est illustré dans la critique – non dénuée d’humour, voire d’une certaine causticité – d’un certain nombre de ses dérives : l’oubli des principes démocratiques par certains fondateurs s’estimant seuls à même de porter « leur » projet ; l’adoption, au nom de l’efficacité, de modes de gestion conçus pour maximiser le profit, aboutissant à la banalisation de grandes organisations ; la certitude de détenir « la » vérité, etc.
Dans ses publications et ses interventions, notamment radiophoniques, Philippe plaidait pour une légitimité de l’ESS fondée sur le partage de valeurs communes et la volonté de construire les actions permettant de les faire vivre. Un engagement différent, selon lui, de celui qui s’exprime au sein de la vie publique, appuyé sur le suffrage universel et l’affrontement de conceptions divergentes, nécessaire pour faire vivre une démocratie.
Philippe Frémeaux aimait le débat, en adepte convaincu du pluralisme en politique comme en économie. Sans jamais céder à la tentation de caricaturer ou de stigmatiser celles et ceux qui ne partageaient pas ses analyses, il ne faisait pas de concessions sur ses convictions et s’astreignait avant tout à la rigueur dans la prise en compte des données comme dans le raisonnement.
Son talent de pédagogue – qui rappelait son passé de professeur de sciences économiques et sociales – et son activité de journaliste soucieux d’être lu, entendu et surtout compris ont fait de Philippe un incomparable diffuseur d’une pensée économique qui ne croyait ni aux vertus d’un libéralisme débridé ni à la régulation autoritaire, mais tentait de s’appuyer sur l’initiative collective sans en nier les difficultés.
Philippe Frémeaux manque déjà à tous ceux qui l’ont connu, ainsi qu’au débat public.
Michel Abhervé
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